Sensible et délicate, la parfumerie d’Anne Flipo se définit par un style figuratif qui puise ses racines dans sa passion des fleurs et des jardins.
Loin du berceau grassois, sa sensibilité olfactive s’éveille dans la Picardie de son enfance, entre les odeurs de bouquets champêtres, de parterres soignés et de potagers bien entretenus. « J’y ai appris la nature et les rudiments d’un art de vivre fait de plaisirs simples, des joies de la botanique aux souvenirs savoureux de cuisine ou de pâtisserie familiale, en passant par la musique, composante essentielle de mon équilibre », souligne-t-elle.
Elle ne viendra que plus tard et « un peu par hasard », précise Anne avec cette sincérité qui la caractérise. Admise à l’ISIPCA ( Institut supérieur international du parfum, de la cosmétique et de l’aromatique alimentaire ) après le baccalauréat, c’est là qu’elle découvre véritablement la magie des essences, leur puissance d’évocation, l’apprentissage et la mémorisation des matières premières. Gagnée par le virus du parfum, elle se jette alors dans la partie comme on se déclare en amour : avec un engagement et une vitalité qui ne lui ont depuis jamais fait défaut.
Premières expériences professionnelles, premiers projets, premières rencontres, elle fait ses armes chez Delaire, Florasynth et Créations Aromatiques, peaufinant ses formules auprès de Jean-Louis Sieuzac, Michel Almairac et quelques autres de ces « maîtres parfumeurs » dont elle admire toujours la virtuosité.
Aujourd’hui, chez IFF ( International Flavors & Fargrances ), elle peaufine son savoir-faire par la connaissance de matériaux high tech et la maîtrise de l’écriture : « je me suis enfin lâchée, je suis plus sereine avec mes intuitions », confie-t-elle.
Longtemps consacré à l’univers des féminins, son talent s’exerce aussi à présent dans la composition des masculins : « j’avais du mal à me projeter dans cette parfumerie. Maintenant, je m’y sens à l’aise » admet-elle. « C’est un territoire plein de promesses, j’ai compris qu’on pouvait s’y épanouir avec une grande jubilation ».
La jubilation, un moteur essentiel pour ce parfumeur qui conçoit avant tout son métier comme un jeu dont les règles changeraient sans cesse : « le parfum est un éternel défi qui nous confronte avec l’imperfection des choses de la création. Tant que demeure la sensation d’inabouti, tout est encore possible, c’est le principe même de la vie ».
Pétillante, curieuse, hédoniste, affamée d’échanges et de complicités, Anne confesse un penchant pour la solitude que sa présence chaleureuse laisse à peine supposer : « J’aime être seule mais paradoxalement bien entourée pour continuer à m’enrichir au contact des autres et ne jamais cesser d’apprendre. Le parfum passe d’abord par la rencontre, le langage : les mots, l’émotion, sont nos premiers matériaux ».
« J’ai toujours l’air triste… Là, ça va ! L’attitude fait jeune, mais mon âge se lit quand même dans mes yeux… Un peu comme quelqu’un qui ne voudrait pas grandir. C’est idiot non ?
Des naturels sublimés, purifiés, de plus en plus beaux !